Biographie

Maturité  |  1930-1948

Reconnaissance mondiale

Les expositions se multiplient en France, à Bruxelles, à Londres, New York, Munich, Genève.

Rouault séjourne à Saint-Malo en 1932. Pierre Matisse, le fils du peintre et marchand d’art lui rend visite et deviendra le principal ambassadeur de son œuvre aux États-Unis.

Sexagénaire, Rouault voit son œuvre accéder à une reconnaissance mondiale. La critique devient foisonnante et unanime. Ses peintures et gravures connaissent un succès croissant. Son art s’apaise dans ces années de gloire et de sécurité financière. Si Rouault a une vie plus sereine et stable, il traverse pourtant des années d’épreuve avec la mort de Vollard, la guerre, l’Occupation et ses suites et enfin son procès avec les héritiers d’Ambroise Vollard.

Georges Rouault sur les remparts de Saint-Malo
Photographie Pierre Matisse
Georges Rouault sur les remparts de Saint-Malo
Photographie Pierre Matisse
Étude pour le portrait d'Ambroise Vollard
Étude pour le portrait d’Ambroise Vollard

Les tensions avec Ambroise Vollard

Vollard lui commande deux autres illustrations Le cirque de l’Étoile filante qui sera publiée en 1936 et Passion qui sera publiée en 1939. Vollard lui reproche ses retards. Rouault supporte de plus en plus mal la pression qu’il subit. À partir de 1934 la relation avec Ambroise Vollard se dégrade.

A. V. veut tout d’un coup (j’ai eu bien tort de ne pas m’en aller en août) peintures, eaux-fortes, noires et couleurs […] et quoi encore ? modèles et bois originaux ! Par centaines… il croit que cela se fait en soufflant dessus… C’est très pénible, sans dire plus […]

Enfin ! il aura des peintures… mais dès qu’il les tiendra, il en demandera d’autres sans se soucier de la charge des ouvrages en cours, qui alors iront de plus en plus au ralenti.

Georges Rouault à André Suarès, Correspondance

Décès d’Ambroise Vollard et seconde guerre mondiale

Le 22 juillet 1939, Ambroise Vollard trouve la mort dans un accident de la route. Rouault est très affecté par son décès.

La Seconde Guerre mondiale éclate et le peintre est contraint de se réfugier dans sa maison de campagne à Beaumont sur Sarthe puis, devant l’avancée allemande, à Golfe-Juan. Sa maison et son atelier de Beaumont seront pillés par les Allemands.

Le procès Vollard

Les héritiers Vollard font poser les scellés à l’atelier Rouault rue Martignac en 1940. Les œuvres sont totalement mises hors de sa portée.

Plusieurs tentatives de négociation échouent. Une des toiles de l’atelier est mise en vente publique. Choqué, l’artiste se voit alors contraint d’attaquer les héritiers en justice pour obtenir la restitution des œuvres inachevées. Commence alors un spectaculaire procès contre les héritiers Vollard qui va durer des années et l’épuiser moralement.

Par jugement en date du 10 juillet 1946 le Tribunal Civil de la Seine condamnait solidairement les héritiers d’Ambroise Vollard à restituer à Georges Rouault des centaines de toiles inachevées sous peine d’une indemnité de 100.000 F par toile. La décision est confirmée par un arrêt de la Cour d’Appel de Paris le 19 mars 1947. Ce jugement accorde au peintre la propriété de son œuvre « tant qu’il ne l’a pas détachée de lui par une livraison librement effectuée ». Cette décision de justice, qui fait jurisprudence en la matière, provoque de nombreuses réactions dans la presse.

Miserere 36
Miserere XXXVI, « Ce sera la dernière, petit père »
Flagellation (vitrail), Assy, 1949
Flagellation (vitrail), Assy, 1949

Tapisseries et vitraux

Une quinzaine de tapisseries selon des œuvres de Rouault sortirent des ateliers d’Aubusson sous la direction de Marie Cuttoli de 1932 à 1938.

Cinq vitraux sont réalisés en 1945 par les ateliers Hébert Stevens d’après des cartons et des toiles de Rouault pour la Chapelle Notre Dame de Toute Grâce du plateau d’Assy.

Construire l’église du XXe siècle : telle était l’ambition des tenants du renouveau de l’art sacré à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Avant la chapelle de Ronchamp construite par Le Corbusier ou celle de Vence, ornée par Matisse, l’église du plateau d’Assy en Savoie devint l’étendard de cette croisade pour l’art religieux contemporain.

Christine Gouzi, Professeur à Sorbonne-Université, « La querelle de l’Art sacré. L’Eglise d’Assy (1937-1950) », L’Objet d’Art, février 1921